Selon le baromètre national du harcèlement au travail, publié en septembre 2022 par Ipsos et Qualisocial, le harcèlement au travail occupe la troisième place des principales préoccupations des salariés en entreprise. Ce problème se positionne après les préoccupations liées au salaire et celles de la dégradation des conditions de travail.
62 % des salariés interrogés constatent que les faits de harcèlement moral au travail sont plus nombreux ces dernières années. 30 % des travailleurs se déclarent en être victimes et 40 % en ont été témoins au moins une fois.
Qu’est-ce que le harcèlement au travail ? Quelles en sont les conséquences et comment le prévenir ? Voici le guide complet.
Qu’est-ce que le harcèlement au travail ?
Il y a harcèlement au travail quand les agissements d’un ou de plusieurs collaborateurs entraînent la dégradation des conditions de travail d’une ou de plusieurs autres personnes.
Les agissements dont il est ici question peuvent se traduire par des insultes, des appels ou des messages téléphoniques intempestifs, des menaces ou du chantage de licenciement, des remarques ou des réflexions déplacées, une répartition injuste de missions, etc.
On pense principalement au harcèlement moral au travail, mais le harcèlement en milieu professionnel peut aussi être physique.
Quelques chiffres de l’OIT sur le harcèlement au travail
En décembre 2022, l’Organisation Internationale du Travail (OIT) publie le rapport intitulé « Données d’expérience sur la violence et le harcèlement au travail : première enquête mondiale ». Ce rapport mentionne qu’un travailleur sur cinq a déjà subi de la violence ou du harcèlement sur leur lieu de travail.
Les actes de harcèlement en question se présentent principalement sous trois formes :
- Harcèlement physique pour 8.5 % des travailleurs
- Harcèlement psychologique pour 17.9 % des travailleurs
- Harcèlement sexuel pour 6.3 % des travailleurs qui sont constitués essentiellement de femmes
En d’autres termes, le harcèlement au travail, qu’il soit physique ou moral, fait partie des principaux facteurs de risques psychosociaux au travail. Il porte atteinte aux droits et à la dignité des personnes harcelées et peut altérer leur santé physique ou leur santé mentale. Le harcèlement peut également mettre en péril toute potentielle évolution professionnelle.
Quelles sont les conséquences du harcèlement au travail
Beaucoup d’entreprises s’engagent à mettre en place une démarche de prévention parce que le harcèlement au travail a des conséquences pouvant être graves, autant l’individu qui le subit que sur l’entreprise.
Les conséquences sur l’individu
Les comportements hostiles étant principalement psychologiques, les conséquences les plus connues du harcèlement au travail, sont psychologiques :
- Détresse psychologique
- Dépression
- Troubles du sommeil
- Idées suicidaires
- Syndrome post-traumatique
Le Bureau International du Travail mentionne d’autres conséquences mentales du harcèlement au travail :
- Irritabilité
- Anxiété
- Baisse de l’estime de soi
- Conduite addictive à l’alcool, aux drogues ou à des médicaments psychotropes
Au fil du temps, ces conséquences psychologiques peuvent entraîner des symptômes physiques plus ou moins importants. Les troubles du sommeil peuvent par exemple, entraîner de la fatigue chronique ou des douleurs musculaires. Le stress psychologique peut aussi accentuer d’éventuelles douleurs gastriques existantes. Par ailleurs, les collaborateurs harcelés peuvent développer une hypertension artérielle et d’autres troubles cardio-vasculaires, des maux de tête chroniques, des troubles du comportement alimentaire, etc.
Au-delà des conséquences physiques et psychologiques, le harcèlement au travail peut aussi entraîner des comportements inhabituels comme l’absentéisme ou au contraire, le présentéisme maladif. Dans ce dernier cas, de peur que le harcèlement ne s’intensifie après une absence, la personne harcelée se présente au travail même en dehors de son emploi du temps.
Évidemment, de telles conditions de travail se répercutent sur la motivation et la productivité des personnes victimes. Ainsi, le harcèlement au travail peut entraîner des inaptitudes professionnelles pouvant conduire à la démission ou au licenciement.
Les conséquences sur l’entreprise
De plus en plus de structures professionnelles organisent la semaine de la prévention en entreprise pour aborder les sujets délicats comme le harcèlement moral au travail. En effet, les répercussions ne concernent pas uniquement les collaborateurs harcelés, mais mettent aussi en péril le développement de l’entreprise dans son ensemble.
Plusieurs paramètres sont directement impactés :
- La productivité
- L’engagement et la confiance des collaborateurs à l’égard de l’entreprise
- Leur assiduité
- La qualité de service
Le harcèlement au travail peut aussi coûter cher à l’entreprise qui risque de payer des coûts légaux et des primes d’assurances collectives plus importantes. L’entreprise pourrait également indemniser les victimes qui engagent des actions judiciaires, au prix fort.
Harcèlement au travail : prévention et lutte
Souvent, le harcèlement au travail se met en place de manière insidieuse, ce qui rend la prévention et la lutte plus difficiles. En effet, même les personnes directement concernées se demandent pendant un certain temps s’il s’agit bien d’un harcèlement moral au travail ou d’un simple problème relationnel entre collaborateurs. En tout cas, la prévention et la lutte sont tout à fait possibles et toutes les parties prenantes de l’entreprise peuvent y participer.
Que dit la loi ?
Plusieurs articles du Code du travail et du Code pénal encadrent les questions de harcèlement au travail et prévoient des sanctions pour les auteurs de harcèlement moral. Ces textes de loi définissent également les obligations de l’employeur par rapport à ce fléau.
Voici quelques articles portant sur la définition et la caractérisation du harcèlement au travail :
- Article L 1152-1 du Code du travail : définition du harcèlement moral et présentation des différentes formes possibles.
- Article L 1134-1 du Code du travail : définition du harcèlement discriminatoire
- Article L 1132-1 du Code du travail : annonce des 18 motifs prohibés pour caractériser le harcèlement discriminatoire.
Par ailleurs, des sanctions disciplinaires sont prévues pour les salariés qui font du harcèlement moral, conformément à l’article L 1152-5 du Code du travail.
Les sanctions pénales quant à elles, sont régies par la loi n°2010-769 du 9 juillet 2010, publiée au Journal Officiel du 10 juillet 2010. Cette loi prévoit une amende de 15 000€ et un an d’emprisonnement si le salarié ayant procédé à des agissements de harcèlement moral a enfreint les dispositions de l’article L 1152-1 du Code du travail.
En dehors des sanctions disciplinaires et pénales, prévues par le Code du travail et le Code pénal, l’auteur de harcèlement moral au travail s’expose à des sanctions civiles, à savoir des indemnités au bénéfice de la victime.
Quelles sont responsabilités de l’entreprise ?
Étant tenue de garantir la santé et la sécurité physique et mentale des collaborateurs, l’entreprise doit se conformer aux dispositions de l’article L 4121-1 du Code du travail. Dans cette perspective, il doit déployer des actions de prévention des risques professionnels, incluant les risques de harcèlement moral au travail. Il doit également prendre des mesures d’information et de formation pour sensibiliser les collaborateurs et mettre en place l’organisation adaptée, avec les moyens nécessaires.
Concernant particulièrement les actions de prévention et d’évaluation des risques professionnels, l’employeur doit se référer à l’accord du 26 mars 2010 qui porte sur le harcèlement et la violence au travail. Cet accord identifie spécifiquement les mesures à prendre. D’autre part, le règlement intérieur de l’entreprise doit rappeler que toute pratique de harcèlement est interdite, que ce soit du harcèlement physique ou du harcèlement moral au travail.
Quels recours pour les personnes harcelées ?
La première démarche à faire en cas de harcèlement moral au travail est de caractériser la situation. Il faudra alors tenir un carnet de bord pour établir le récit des faits dans leur chronologie. La victime peut constituer un dossier avec toutes les preuves qu’elle peut réunir. En cas d’actions en justice, ces éléments permettent de présumer l’existence du harcèlement. Le plaignant pourra alors appuyer sa démarche avec des éléments matériels précis.
Ensuite, il existe des relais internes et externes auxquels le salarié victime de harcèlement au travail peut avoir recours.
En interne, il peut faire appel aux Institutions Représentatives du Personnel, via notamment les délégués du personnel. Ces derniers saisissent à leur tour, l’employeur qui devra procéder à une enquête et déployer les moyens nécessaires pour remédier à la situation, conformément aux recommandations de l’article L 2313-2 du Code du travail. En plus des délégués du personnel, le salarié victime de harcèlement moral au travail peut également présenter sa situation aux organisations syndicales, au CHSCT (Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail), au médecin du travail ou encore directement, à l’employeur.
En externe, le salarié harcelé peut saisir le médiateur, dont le choix se fait en accord avec toutes les parties prenantes. Réalisée conformément aux dispositions de l’article L 1152-6 du Code du travail, la médiation permet d’aboutir à une conciliation des différentes parties grâce à des propositions écrites soumises par le médiateur. L’inspection du travail est aussi un recours externe possible pour faire face au harcèlement au travail.
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